Écouter sans les mots – Les signaux d’apaisement, synonyme d’une relation harmonieuse

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Imaginez un ins­tant que vous arri­vez dans un pays dont vous ne maî­tri­sez pas la langue. Vous ten­tez de vous faire com­prendre avec des gestes, des regards, des mimiques… et per­sonne ne semble vous entendre. Pire encore, vos inten­tions sont inter­pré­tées de tra­vers : votre geste pour cal­mer une situa­tion est perçu comme de l’arrogance, votre regard fuyant comme de la crainte irra­tion­nelle. À la longue, vous seriez frus­tré, stressé, peut-​être même replié sur vous-même.

C’est exac­te­ment ce que vit un chien dont le gar­dien – son humain si vous pré­fé­rez – ignore le lan­gage canin.

Le langage oublié des chiens

Nos chiens ne parlent pas, mais ils com­mu­niquent en per­ma­nence. Chaque mou­ve­ment de leur corps, chaque posi­tion de leurs oreilles, de leur queue, leur pos­ture et leur regard consti­tuent un mes­sage : il suf­fit de savoir regar­der et inter­pré­ter. Parmi tous ces signaux, il en existe un ensemble très par­ti­cu­lier appe­lés signaux d’apaisement (ou cal­ming signals), terme popu­la­risé par l’éducatrice et com­por­te­men­ta­liste nor­vé­gienne Turid Rugaas dont je vous recom­mande vive­ment les divers livres qu’elle a écrit sur le sujet.

Ces signaux sont des mes­sages paci­fi­ca­teurs. Le chien s’en sert pour :

  • désa­mor­cer un conflit naissant,
  • expri­mer son incon­fort ou son malaise,
  • ou tout sim­ple­ment ten­ter de cal­mer une situa­tion poten­tiel­le­ment tendue.

Il ne les adresse pas seule­ment à ses congé­nères, mais aussi… à nous, les humains. Pourtant, s’ils passent inaper­çus, le chien se retrouve sans autre moyen pour expri­mer son stress que le gro­gne­ment ou, dans cer­tains cas, la mor­sure. Dans son ouvrage On Talking Terms with Dogs : Calming Signals, Turid Rugaas alerte :

« La plu­part des com­por­te­ments pro­blé­ma­tiques com­mencent parce que les humains ne recon­naissent pas ce que le chien essaie de dire. »

Exemples de signaux d’apaisement

Voici quelques gestes et pos­tures que l’on ren­contre fréquemment :

  • Se lécher le nez : un mou­ve­ment très rapide qui res­semble à un « net­toyage » du museau, sou­vent uti­lisé lorsqu’un chien se sent mal à l’aise.
  • Bâiller : bâiller len­te­ment en regar­dant quelqu’un peut signi­fier « Je ne veux pas d’ennui ».
  • Détourner la tête ou le regard : face à une situa­tion stres­sante, le chien évi­tera le regard direct pour ne pas accroître la tension.
  • Marcher en arc de cercle : au lieu d’aller droit dans la direc­tion de quelqu’un (ou de quelque chose), il choi­sit de faire un détour pour signi­fier qu’il ne cherche pas la confrontation.
  • S’arrêter sou­dai­ne­ment : en plein mou­ve­ment, le chien se fige pour dire « je ne suis pas sûr ; je m’arrête ».
  • Renifler le sol : feindre un inté­rêt sou­dain pour une odeur au sol afin d’éviter une inter­ac­tion tendue.
  • Se grat­ter sans rai­son médi­cale appa­rente : c’est un pré­texte pour tem­po­ri­ser, gagner du temps et cal­mer la situation.
  • S’asseoir ou se cou­cher dou­ce­ment : adop­ter une pos­ture plus déten­due pour indi­quer qu’il ne cherche pas la bagarre.

Dès le plus jeune âge, un chiot uti­lise déjà ces signaux. Si nous, humains, les igno­rons, nous cour­rons le risque de faire mon­ter la pres­sion jusqu’à ce que le chien n’ait plus d’autre choix que d’adopter un com­por­te­ment défen­sif (gro­gne­ment, fuite ou morsure).

Comprendre les signaux, c’est construire la confiance

Reconnaître ces signaux ne sert pas seule­ment à évi­ter les conflits ou les mal­en­ten­dus : c’est aussi le fon­de­ment d’une rela­tion de confiance entre l’humain et le chien.

Turid Rugaas insiste sur ce point dans cha­cune de ses conférences :

« Un chien qui voit que son humain répond cal­me­ment à ses signaux d’apaisement apprend qu’il est entendu. Il devient plus confiant, plus calme, et plus résilient. »

En édu­ca­tion canine posi­tive (notam­ment dans les approches anglaises ins­pi­rées par Rugaas), on parle d’intel­li­gence émo­tion­nelle inter-​espèce. Concrètement, cela signi­fie que le chien, sen­tant qu’il peut « dia­lo­guer » sans crainte de se faire gron­der ou répri­man­der, devient un véri­table par­te­naire dans la relation.

Ce lien fondé sur la sécu­rité émotionnelle** :

  1. Renforce l’équilibre psy­cho­lo­gique du chien.
  2. Diminue le stress au quo­ti­dien, car le chien se sent en confiance et moins anxieux.
  3. Accroît la réac­ti­vité posi­tive en appren­tis­sage (il sera plus récep­tif aux exer­cices et aux ordres).
  4. Pacifie la coha­bi­ta­tion entre l’humain et l’animal, car le chien ne se sent pas obligé d’utiliser des moyens extrêmes pour se protéger.

À retenir

  • Les signaux d’apaisement sont des gestes pré­ven­tifs qu’utilise le chien pour apai­ser ou désa­mor­cer une tension.
  • Ignorer ces signaux, c’est rompre la com­mu­ni­ca­tion et aug­men­ter les risques de stress ou d’agression.
  • Les recon­naître per­met de répondre serei­ne­ment, d’adapter son com­por­te­ment et de ren­for­cer la confiance mutuelle.
  • Comme le répète Turid Rugaas : « Un chien entendu est un chien calme. »

🐾Astuce d’éducatrice : mimer les signaux, pour mieux parler chien !

Il y a vingt ans, dans mes classes d’éducation pour chiots, j’invitais déjà les humains à imi­ter les signaux d’apaisement de leur com­pa­gnon. Bâiller len­te­ment, détour­ner la tête, mar­cher en courbe, s’arrêter cal­me­ment… Autant de gestes per­çus par le chien comme des réponses com­pré­hen­sibles et rassurantes.

À l’époque, cette approche sem­blait ori­gi­nale, voire sur­pre­nante pour cer­tains. Aujourd’hui, les recherches et les obser­va­tions de Turid Rugaas confirment plei­ne­ment cette intuition :

« Le lan­gage cor­po­rel est uni­ver­sel dans les inter­ac­tions sociales canines. Les chiens per­çoivent nos gestes bien plus que nos mots. Mimer un signal, c’est lui dire : “Je t’entends, tout va bien.” »

En pra­ti­quant vous-​même ces gestes, vous envoyez au chien un mes­sage clair :

  1. Je me mets à ton niveau, je te com­prends, tu es en sécurité.
  2. Je ne suis pas une menace, j’essaie de créer un cli­mat apaisé.
  3. Je ren­force notre connexion : plus vous imi­tez ces signaux, plus votre chien sera enclin à vous faire confiance et à vous com­mu­ni­quer ses besoins.

Les signaux d’apaisement sont une forme de lan­gage silen­cieux, mais extrê­me­ment puis­sante. Apprendre à les repé­rer et à y répondre, c’est offrir à son chien l’assurance qu’il peut s’exprimer sans être jugé. À l’inverse, négli­ger ces signaux, c’est lais­ser la frus­tra­tion et le stress s’installer, au risque de voir appa­raître des com­por­te­ments indésirables.

En gar­dant à l’esprit que chaque bâille­ment, chaque détour de regard ou chaque grat­tage peut être un appel à la bien­veillance, vous pose­rez les bases d’une rela­tion équi­li­brée : votre chien se sen­tira entendu, res­pecté et en confiance, et vous, en tant que gar­dien, gagne­rez en séré­nité au quotidien.

« Un chien entendu est un chien calme » ; culti­vez cette écoute muette, et vous décou­vri­rez le véri­table poten­tiel d’une com­mu­ni­ca­tion har­mo­nieuse entre l’humain et le meilleur ami de l’homme, pour être et res­ter ZEN DANS MES PATTES

Vanda & Fabienne

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