Aujourd’hui on parle d’“explosion” des cancers chez l’humain… et de plus en plus chez nos animaux de compagnie. Nous sommes beaucoup à nous demander s’il y a vraiment plus de cancers qu’avant, ou si ceux-ci sont mieux repérer par avance ?
Mais la question principale reste la suivante : que puis-je faire pour réduire le risque pour mon animal ?
Cet article fait le point sur les connaissances actuelles et propose des conseils pratiques, basés sur des études vétérinaires récentes.
Le cancer chez le chien : où en est-on vraiment ?
Une cause majeure de mortalité
Plusieurs grandes études et registres vétérinaires convergent aujourd’hui :
- Le cancer est l’une des principales causes de mortalité chez le chien adulte, parfois la première cause dans certains pays.
- Des estimations issues de centres de cancérologie vétérinaire indiquent qu’en moyenne un chien sur trois développera un cancer au cours de sa vie, un ordre de grandeur similaire à l’humain.
Une étude récente basée sur plus de 14 000 chiens atteints de tumeurs confirme que les tumeurs malignes sont plus fréquentes chez les chiens âgés, et que le risque augmente fortement avec l’âge.
Observe-t-on une véritable hausse des cas ?
Plusieurs travaux rétrospectifs suggèrent une augmentation de l’incidence des tumeurs chez le chien et le chat au cours des dernières décennies :
- Une étude de 2025 signale que les tumeurs chez les chiens et les chats sont en hausse de manière “régulière”, avec des tumeurs mammaires et cutanées parmi les plus fréquentes.
- Une analyse d’hôpital vétérinaire sur 10 ans (2009 – 2018) met également en évidence une augmentation progressive du nombre de cas de tumeurs chez les chiens de compagnie.
La réponse reste nuancée, avec un oui, mais …
Oui, les données disponibles suggèrent une augmentation des tumeurs diagnostiquées chez les chiens (et les chats). Mais cette hausse s’explique en partie par :
- Des chiens qui vivent plus longtemps qu’autrefois.
- Des outils de diagnostic plus performants (imagerie, analyses, biopsies).
- Une plus grande sensibilisation des propriétaires, qui consultent plus tôt.
Cela n’exclut pas une augmentation réelle de certains cancers, liée à l’environnement, à l’obésité ou à des facteurs de mode de vie — exactement comme chez l’humain.
Pourquoi a‑t-on l’impression d’une “explosion” des cancers ?
Les chiens vivent plus longtemps
Des études comparatives chez l’humain et le chien montrent que plus l’espérance de vie augmente, plus le risque de voir apparaître des cancers grimpe, simplement parce que les cellules ont plus de temps pour accumuler des lésions.
Les progrès en médecine vétérinaire (vaccins, antiparasitaires, alimentation, chirurgie, réanimation…) ont permis à beaucoup de chiens :
- de survivre à des maladies infectieuses ou à des accidents qui, autrefois, étaient fatals ;
- d’atteindre un âge où les cancers deviennent beaucoup plus fréquents.
Génétique, races et sélection
Tous les chiens ne sont pas égaux face au cancer.
- Certaines races (Retriever, Boxer, Bouvier bernois, Schnauzer géant, etc.) présentent des taux de tumeurs malignes particulièrement élevés dans les registres.
- Une étude récente montre que le risque de mortalité par cancer augmente avec la taille corporelle et le degré d’endogamie (consanguinité) : les grandes races et certaines lignées très sélectionnées paient un “prix” biologique plus fort.
En d’autres termes : le chien moderne, tel que nous l’avons façonné par la sélection des races, porte parfois une vulnérabilité génétique au cancer.
On ne peut pas changer la génétique de son animal, mais on peut réduire l’exposition aux autres facteurs de risque.
Obésité, sédentarité et inflammation
Chez l’humain, le lien entre obésité et cancer est bien établi. Des revues récentes montrent qu’un mécanisme similaire existe chez le chien : l’excès de graisse entretient une inflammation chronique qui favorise certaines tumeurs (mammaires, vésicale, etc.).
Des études anciennes et récentes :
- retrouvent plus de tumeurs bénignes et malignes chez les chiens obèses que chez ceux de poids normal ;
- montrent un risque accru de certains cancers de la vessie chez les chiens obèses, indépendamment de l’exposition à d’autres substances chimiques.
Là encore, le parallèle avec l’humain est frappant. Un chien en surpoids chronique a plus de risques de développer un cancer qu’un chien au poids optimal.
Environnement, polluants et “effet sentinelle”
Les chiens partagent notre quotidien, nos maisons, nos trottoirs, nos jardins… et nos polluants.
Des revues récentes sur les cancers canins liés à l’environnement montrent que :
- Les chiens peuvent servir de “sentinelles” des carcinogènes environnementaux, car ils sont exposés aux mêmes substances que nous sur une vie plus courte.
- Des travaux suggèrent un rôle de :
- la fumée de tabac (cancers respiratoires, troubles cardiorespiratoires),
- certains pesticides, herbicides et produits de jardinage,
- des polluants de l’air et contaminants de l’eau du robinet, associés à un risque accru de lymphomes ou de cancers de la vessie.
Le Merck Veterinary Manual rappelle que les animaux de compagnie et leurs gardiens sont exposés à des facteurs communs : UV, fumée, produits agricoles, pollution atmosphérique, etc., et que ces facteurs peuvent contribuer à l’apparition de cancers.
Hormones, stérilisation et cancers : un sujet complexe
La stérilisation influence aussi le risque de certains cancers :
- Chez la chienne, stériliser avant les premières chaleurs réduit massivement le risque de tumeurs mammaires ; ce risque augmente si la stérilisation est tardive ou absente.
- En contrepartie, plusieurs analyses suggèrent qu’une stérilisation précoce pourrait augmenter la fréquence de certains cancers (mastocytomes, ostéosarcomes, lymphomes) dans certaines races.
Les données ne sont ni simples ni uniformes selon les races. Il n’existe pas une bonne réponse valable pour tous les chiens.
👉 D’où l’importance de discuter avec votre vétérinaire (idéalement avec un vétérinaire comportementaliste ou spécialisé en médecine préventive) du meilleur âge et des bénéfices/risques de la stérilisation pour votre animal.
Ce que vous pouvez faire, concrètement, pour réduire le risque
Il n’existe aucune garantie de prévenir totalement le cancer (ni chez l’humain, ni chez l’animal). Par contre, comme en santé humaine, on peut réduire les risques.
Garder un poids corporel optimal
- Demandez à votre vétérinaire quelle est la note d’état corporel idéale pour votre chien.
- Adaptez les quantités de nourriture en fonction de l’âge, de l’activité, de la stérilisation.
- Limitez les friandises caloriques ; préférez de très petites quantités ou des alternatives plus légères (légumes adaptés, par ex.).
- Mettez en place une activité quotidienne adaptée (marche, jeux, flair, nage, etc.) plutôt que de rares séances très intenses.
👉 Un chien mince vit plus longtemps, avec moins de risques de cancers, de diabète, d’arthrose et de maladies cardiovasculaires.
Réduire l’exposition aux polluants
- Pas de tabac dans la maison ni dans la voiture avec l’animal.
- Limiter l’utilisation de pesticides, herbicides et produits de jardinage ; privilégier des alternatives plus sûres, et empêcher le chien de lécher les surfaces traitées ou de se rouler dans l’herbe immédiatement après traitement.
- Rincer les pattes et le ventre après une promenade en ville si votre chien marche sur des trottoirs potentiellement traités ou très pollués.
- Envisager, si nécessaire, une filtration de l’eau du robinet, surtout dans les zones très industrialisées, certaines études reliant contaminants de l’eau et cancers de la vessie chez le chien.
- Aérer régulièrement le logement, éviter la surutilisation de parfums d’ambiance, sprays irritants, encens très fréquents, etc.
Protéger la peau
- Certains chiens à peau claire, peu pigmentée, ou avec des zones peu poilues (truffe rose, oreilles blanches…) sont sensibles aux UV et plus à risque de tumeurs cutanées.
- Évitez les expositions prolongées au soleil de midi, surtout l’été.
- Demandez à votre vétérinaire des crèmes solaires adaptées aux chiens pour les zones à risque (ne jamais utiliser un produit humain sans avis professionnel).
Choisir avec soin les produits “naturels”
Même sur un site orienté soins naturels, il est important de le rappeler : “Naturel” ne veut pas dire “inoffensif”.
Certaines plantes, huiles essentielles ou extraits peuvent être irritants, toxiques, voire potentiellement carcinogènes si mal utilisés.
- Ne donnez aucun complément “anticancer” sans avis vétérinaire.
- Prudence avec les mélanges d’huiles essentielles diffusées en continu, surtout dans les petits espaces.
Vaccins, antiparasitaires et arbitrages raisonnés
Les vaccins et antiparasitaires modernes font régulièrement l’objet d’inquiétudes sur les réseaux sociaux. À ce jour, les bénéfices pour la santé publique animale sont largement démontrés, et les liens directs avec une augmentation de cancers restent faibles ou non confirmés dans la littérature, comparés à d’autres facteurs (âge, génétique, obésité, environnement).
La bonne approche :
- Adapter les protocoles au mode de vie réel de l’animal (chien citadin vs chien de montagne, voyages, contact avec des congénères, etc.).
- Discuter ouvertement avec votre vétérinaire de vos inquiétudes pour trouver un équilibre entre protection contre les maladies infectieuses et réduction des expositions inutiles.
Décider de la stérilisation au cas par cas
Au lieu de “stériliser tout le monde à 6 mois” par principe :
- Discutez avec votre vétérinaire des risques propres à la race (ou au type) de votre chien :
- risque de tumeurs mammaires, de pyomètre (infection de l’utérus) chez les femelles,
- risques articulaires et de certains cancers chez les grandes races castrées très tôt.
- Élaborez une stratégie personnalisée : âge de stérilisation, ou éventuellement choix de laisser l’animal entier avec une surveillance renforcée.
Dépistage précoce : ce que vous pouvez surveiller à la maison
Plus un cancer est détecté tôt, plus les options thérapeutiques sont nombreuses et plus le pronostic est favorable.
Surveillez régulièrement votre chien pour :
- Toute masse ou “boule” sous la peau qui apparaît ou grossit.
- Une plaie qui ne cicatrise pas.
- Une boiterie persistante, surtout chez un grand chien.
- Une toux chronique, un essoufflement inhabituel.
- Une baisse d’appétit, une perte de poids inexpliquée.
- Des vomissements ou diarrhées chroniques, surtout avec altération de l’état général.
- Des changements de comportement : fatigue extrême, irritabilité, retrait.
👉 Réflexe si “Je sens une boule” = je prends rendez-vous chez le vétérinaire, même si l’animal ne semble pas souffrir.
Ne tentez pas d’auto-traiter un “kyste” supposé avec des remèdes maison : seule une analyse (cytoponction, biopsie) peut dire si une masse est bénigne ou maligne.
En résumé
- Oui, les données disponibles suggèrent une augmentation des tumeurs diagnostiquées chez les chiens (et les chats).
- Cette hausse s’explique par :
- la longévité accrue de nos compagnons,
- une meilleure détection et un accès facilité aux soins,
- mais aussi des facteurs de mode de vie et d’environnement (obésité, sédentarité, polluants, tabac…).
- Vous ne pouvez pas tout contrôler (génétique, hasard…), mais vous pouvez :
- maintenir un poids optimal,
- limiter l’exposition aux polluants et à la fumée,
- protéger du soleil les animaux à peau claire,
- discuter sans tabou de la stérilisation avec votre vétérinaire,
- pratiquer une surveillance régulière et consulter tôt.
Le but n’est pas de vivre dans la peur du cancer, ni d’en faire une fatalité, mais de considérer votre chien comme un partenaire sensible à notre environnement.
En prenant soin de son mode de vie, vous améliorez aussi souvent le vôtre – et vous renforcez cette relation qui est, à elle seule, un véritable facteur de santé pour tout le monde. 🐾💚
Fabienne – Mon Ami le Chien
